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Quel été après un printemps frais ?

Par Regis CREPET, météorologue
mis à jour le

Le printemps actuel, loin d’être terminé, pourrait s’avérer un peu plus frais que les moyennes de saison en France, et plutôt sec. A un mois de l’été, la physionomie de ce printemps 2021 peut-elle constituer un indicateur d'une tendance pour l'été ?

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Le printemps météorologique n'est pas terminé. Il concerne les mois de mars, avril et mai. Mars a été à peine plus chaud que les normales (+0,2°C), avril a été marqué par des épisodes de gel record et se termine dans le négatif avec une anomalie proche de -0,7°C, et mai pourrait être juste dans les moyennes de saison selon notre tendance à moyen terme. Concernant la pluviométrie, la France subit un important déficit qui pourrait s'atténuer un peu en mai. Nous pourrions alors connaître un printemps sec, avec un léger déficit thermique, ce qui ne serait pas arrivé depuis 2016. Si cette tendance se confirme, y'a-t-il des corrélations statistiques permettant d'établir une tendance pour les mois de juin, juillet et août ?

Des statistiques modifiées par le réchauffement climatique

© La Chaîne Météo

Les statistiques permettent de mettre en avant des cycles climatiques. Grâce à l'analyse de données très anciennes, des récurrences peuvent être mises en évidence. C'est le cas d'une étude (1) qui s'est attachée à compiler les données sur les printemps et les étés de 1600 à 2000 en France. L'analyse de cette étude fait apparaître que dans 56% des cas, des printemps frais ont été suivis par des étés frais (et 62% humides). Si l'on suit ces statistiques, nous aurions donc plus d'une chance sur deux d'avoir un été plus frais que la normale. Oui mais…

Ce que l'on note, c'est que cette corrélation a été valable jusque dans les années 1980, et que depuis une trentaine d'années, elle se vérifie de moins en moins. En effet depuis 1985, les printemps qui ont été normaux voire en-dessous des normes ont été suivis majoritairement d'été doux à chaud (anomalie > +0,3°C) et non plus d'étés frais.

Si le réchauffement climatique contemporain n'est probablement pas étranger à l'évolution de ces statistiques depuis 1985, et que l'on considère que ce dernier est une tendance de fond qui s'inscrit dans la durée, cela n’empêche pas la survenue de printemps frais (comme en 2016 pour le dernier en date) ni d’étés plus maussades tel 2014. Mais la récurrence, qui était supérieure à 90% avant 1985, devient nettement plus aléatoire depuis 30 ans et à fortiori depuis 2000, où cette combinaison ne s’est plus reproduite.

Malgré le réchauffement climatique, certaines années montrent des saisons moins chaudes avec des décrochages. Cette statistique a donc le mérite de souligner que 2021 pourrait marquer un "décrochage" des températures estivales et à un retour d'une pluviométrie excédentaire, mais dans une proportion nettement plus faible qu'avant les années 1980.

Une fois ces statistiques analysées, l'autre piste pour essayer de dégager une tendance pour l'été concerne les prévisions saisonnières. Vont-elles dans le même sens ?

Qu'indiquent les prévisions saisonnières ?

Les prévisions saisonnières utilisées de nos jours fonctionnent sur la base de modèles numériques, qui intègrent peu la statistique mais qui lissent néanmoins les prévisions sur la base des normales climatiques. Nos prévisions saisonnières, dont la prochaine actualisation du 10 mai confirmera ou non la statistique, anticipaient jusqu’à ce jour un été 2021 plus chaud et plus sec sur la France pour le trimestre juin, juillet et août. Mais, depuis quelques semaines, la modélisation semble se recaler vers une tendance qui se rapprocherait un peu de la statistique, à savoir le retour des précipitations pour cet été, notamment en juillet et août, parfois de manière excédentaire. Les températures resteraient supérieures aux moyennes en juin pour s’infléchir surtout en août, qui serait alors, à ce jour, le mois le plus perturbé de notre été.

L'analyse de ces résultats laisserait alors à penser que l'été 2021 présenterait en France une physionomie différente des 6 derniers étés, qui ont été remarquablement chauds et secs. Nous pourrions alors connaître cette année un été marqué par une évolution orageuse possiblement virulente.

Que retenir de la statistique et de la prévision saisonnière pour cet été ?

On le voit, la statistique apporte une vision complémentaire dans l’élaboration de tendances météo à long terme, à condition de l’étudier de façon très approfondie en liaison avec la multitude de cycles qui peuvent se recouper et se juxtaposer. L’exercice n’est pas simple d’autant plus que le réchauffement climatique actuel semble changer la donne depuis ces trente dernières années, de telle sorte que la concordance entre les printemps frais et les étés frais n'est plus probante sur la période 2000-2020.

Mais, cette année, il semblerait que la prévision basée sur les cycles et les prévisions saisonnières numériques convergent légèrement en faveur d’un été qui serait nettement plus humide et moins chaud que les 6 derniers, ce qui serait une très bonne nouvelle pour freiner la sécheresse. Mais cette probabilité reste fragile alors qu'elle aurait été fiable avant les années 1980. Elle n'est cependant pas nulle dans la mesure où malgré le réchauffement climatique, des décrochages existent toujours et où le poids de cette statistique était particulièrement probant sur près de 400 ans, entre 1600 et 2000.

Notes

Tendances saisonnières et solaires (Thibaud Mériel)

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