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Hiver printanier : pourquoi le froid n'arrive pas à s'installer en France ?
Notre pays connait un nouvel hiver doux, mais les grands froids ne sont pourtant pas très loin, installés en Scandinavie, et parfois jusqu'au Benelux. Malgré quelques tentatives, ce froid n'arrive pas à s'installer sur notre pays et n'est pas prévu ces prochaines semaines. Comment expliquer cette situation ?
Nous nous dirigeons vers un hiver 2023-2024 encore une fois doux sur la France. À la différence de l'hiver dernier, qui avait été encore plus doux, le froid cette année est bien présent sur l'Europe du Nord et de l'est, mais malgré quelques tentatives, il n'a pas réussi à s'imposer jusqu'à chez nous. Comment expliquer ces blocages ?
Des hivers plus doux: une tendance de fond
En France, depuis 2013, on observe un radoucissement marqué de nos hivers. Même si nous avons connu des épisodes froids et de la neige en plaine en France, comme en février 2018 par exemple, la dernière vague de froid significative date d'il y a plus de 10 ans (février 2012, et plus temporairement janvier 2017).
La première explication qui vient à l'esprit est le réchauffement climatique, qui est une tendance de fond bien visible. Mais celle qui est moins spontanée est la situation "synoptique" (situation générale) et la remontée vers le nord des anticyclones subtropicaux, qui ont aussi une part dans l'explication de cette situation.
Un anticyclone qui n'est pas à sa place habituelle
En effet, les conflits de masses d'air ont été puissants sur l'Europe depuis le mois de novembre, avec l'installation durable des grands froids sur la Scandinavie, puis sur la Russie et l'Islande. Souvent associés à un anticyclone présent sur la Russie et poussés par des vents d'est, ces grands froids ont parfois gagné le Benelux, frôlant la France comme cela s'est produit début décembre et autour du 10 janvier, sans parvenir à s'imposer ni à s'installer durablement. La douceur, associée à un anticyclone subtropical remontant très au nord pour cette époque de l'année, est restée prédominante sur l'Atlantique et surtout sur l'ensemble du bassin méditerranéen, de l'Espagne au Maghreb et au sud de la France. Cet air doux a favorisé de longues périodes de temps sec au sud de la Loire, les pluies étant rejetées au nord.
En hiver, ces anticyclones sont habituellement situés plus au sud, laissant circuler les flux d'ouest dominant sur notre pays, ce qui détermine les types de temps.
Or, on a tendance à constater, depuis une décennie, que ces anticyclones africains remontent davantage vers le nord. En été, cette configuration entraîne des périodes de fortes chaleurs et de sécheresse sur l'Europe, tandis qu'en hiver, elle repousse vers le nord les perturbations, et s'accompagne d'air doux, ce qui se produit avec nos hivers depuis une dizaine d'années.
Plusieurs études mettent en avant cette constatation et notent que cette modification de la position des centres d'action serait liée au réchauffement climatique global, dilatant ces hautes pressions vers le nord, avec un différentiel de température moins fort entre le pôle et l'équateur. Cette modification accentuerait également, telle une boucle sans fin, le réchauffement sur ces zones.
Dans son dernier rapport*, le GIEC indique également que la circulation de Hadley (nota : les hautes pressions subtropicales) s'est probablement élargie depuis au moins les années 1980, principalement dans l'hémisphère nord. Il est aussi noté que les modèles présentés par le GIEC prévoient bien un renforcement de la chaleur en haute troposphère sur la ceinture tropicale avec débordement dans l'hémisphère nord.
On constate donc que de nombreux paramètres entrent en jeu dans l'explication de cette douceur exceptionnelle que nous avons connue ces dernières années et que nous connaissons cette année encore. Les centres d'action (anticyclones et dépressions) ne se situent pas à leur position "classique", et la modification profonde de la circulation générale pousse vers le nord les masses d'air subtropicales.
Dans ces conditions, le bras de fer entre l'air froid et l'air doux aboutit inéluctablement à la victoire de ce dernier.