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Poussières du Sahara : quels sont les impacts sur la météo ?
Ce week-end, un nouvel épisode de poussières du Sahara se produit sur l’hexagone, l’occasion d’évoquer les conséquences de ces particules fines sur la météorologie et notre climat en général. En effet, bien qu’elles puissent limiter la hausse des températures, il existe d’autres effets qui ne se restreignent pas à ce seul aspect.
Pourquoi et comment ces poussières arrivent jusque chez nous ?
Les poussières désertiques, que l’on a l’habitude d’observer dans le ciel en France chaque année, proviennent en majorité du Sahara.
Pour se retrouver dans le ciel de nos villes, elles doivent d'abord être soulevées du sol par la chaleur intense des déserts, et par le vent. C'est actuellement le cas, avec des masses d’air très chaud situées au-dessus du désert saharien et des températures exceptionnelles (48,5 °C relevés mercredi 3 avril au Mali, constituant le record mensuel d’avril de tout le continent africain). Quand une dépression vient se creuser et se positionner près de la Péninsule ibérique, un fort vent de sud/sud-ouest peut également se lever sur les pays du Maghreb. Cette configuration permet de soulever d’importantes quantités de sable sur ces régions, provoquant alors des tempêtes de sable.
Une fois en suspension dans l'air, ces particules sont reprises dans la circulation atmosphérique générale, et transportées sur des milliers de kilomètres et sur toute l’Europe lorsque le flux de sud est puissant. Il est déjà arrivé qu'un panache de sable du Sahara traverse l’Atlantique en un week-end et atteigne le golfe du Mexique et la côte des États-Unis, parcourant ainsi plus de 10 000 km.
Quels sont les impacts sur le climat et la météo ?
L'impact de ces poussières sur le climat et la météo est complexe. Il dépend de plusieurs paramètres qui influencent directement la manière dont elles interagissent avec la lumière solaire :
- Leurs propriétés optiques, qui caractérisent la capacité de ces particules à absorber ou diffuser le rayonnement solaire et infrarouge
- Leurs propriétés physico-chimiques, qui dépend du pays et de la composition du sol d'où elles proviennent
- Leur densité, qui dépend de plusieurs paramètres météo
Leur taille, leur forme et leur composition chimique déterminent donc leur capacité à réfléchir, absorber ou laisser passer la lumière, et leurs effets peuvent être variés.
Effet refroidissant
L'effet refroidissant des poussières sahariennes, qui est l'effet majoritaire, est principalement dû à leur capacité à réfléchir une partie du rayonnement solaire avant qu'il n'atteigne la surface de la terre (effet albédo), ce qui peut entraîner une très légère baisse des températures à la surface du globe, et dans les couches inférieures de l'atmosphère. Cette réflexion dépend de la densité et de la blancheur des poussières, qui peuvent créer un écran partiel entre le soleil et la terre.
Une étude (1) réalisée par des chercheurs de l'UCLA à ce sujet indique que la quantité de poussière désertique atmosphérique a augmenté globalement d'environ 55 % depuis le milieu des années 1800. Cette augmentation aurait probablement eu un léger effet de refroidissement global sur la planète en masquant jusqu'à 8 % du réchauffement causé par l'augmentation des gaz à effet de serre. L'effet refroidissant survient parce que les particules de poussière réfléchissent la lumière du soleil dans l'espace, mais dissipent aussi les nuages élevés qui autrement réchaufferaient la planète. Les chercheurs indiquent également que si la poussière atmosphérique cesse d'augmenter, le potentiel de réchauffement supplémentaire caché des gaz à effet de serre pourrait provoquer un réchauffement climatique plus rapide que ce que les modèles actuels prévoient.
Effet réchauffant
Paradoxalement, ces particules peuvent générer l'effet inverse du refroidissement. Lorsque les poussières absorbent certaines longueurs d'onde du rayonnement solaire, elles réchauffent l'air autour d'elles. Ce processus est particulièrement notable dans les couches supérieures de l'atmosphère, où elles peuvent contribuer à une augmentation de la température.
Le réchauffement causé par ces poussières peut aussi être plus localisé. Une étude de 2012 (2) de la NASA indique que la poussière élevée au-dessus des déserts du monde cause un effet de réchauffement localisé plus significatif que ce qui était précédemment pensé. Cette étude indique que plus de la moitié de l'effet refroidissant de la poussière est compensé par son effet de réchauffement. Ces résultats pourraient éclaircir notre compréhension de l'influence de la poussière sur les fluctuations d'humidité dans l'atmosphère et sur les températures de surface autour de la planète. L'effet de réchauffement de la poussière sur l'atmosphère pourrait être un facteur sous-estimé influençant l'évaporation, la convection atmosphérique et l'instabilité.
Facilitation de la formation des nuages
Enfin, les poussières du Sahara jouent un rôle crucial dans la formation des nuages. Elles agissent comme des noyaux de condensation autour desquels les gouttelettes d'eau peuvent se former, facilitant ainsi la création de nuages.
Une étude (3) a montré que lors d'épisodes de poussière saharienne, la formation de cirrus, qui sont des nuages étendus dans les couches supérieures de l'atmosphère, est l'effet dominant de la poussière. Ces cirrus poussiéreux se forment principalement à travers une instabilité de mélange de l'air propre humide avec de l'air sec et poussiéreux, nécessitant une paramétrisation spécifique dans les modèles de prévision pour être simulés correctement.
Ces poussières peuvent donc augmenter la couverture nuageuse, modifiant les schémas de précipitations et potentiellement conduisant à des phénomènes météorologiques plus intenses ou plus fréquents dans certaines régions.
Les autres effets des poussières de sable
D'autres impacts directs peuvent survenir lors de ces épisodes de poussière sur notre pays.
Santé : la qualité de l'air se trouve dégradée, ce qui a une influence directe sur la santé, en affectant les voies respiratoires des personnes sensibles telles que les nourrissons ou personnes âgées.
Fonte de la neige : en recouvrant la neige, les poussières réduisent son pouvoir réfléchissant, ce qui peut entraîner sa fonte plus rapide.
Limitation de la production solaire : en recouvrant les installations d'énergie solaire, les fines pellicules de poussière du Sahara peuvent temporairement et de façon limitée réduire l'efficacité des cellules photovoltaïques.
Les nombreux effets de ces poussières Sahariennes mettent en évidence leur rôle important dans la dynamique atmosphérique. Ils soulignent également la nécessité d'intégrer avec précision ces interactions dans les modèles climatiques et météorologiques pour améliorer les modèles de prévisions et comprendre encore mieux les impacts sur notre climat.